Faire progresser la recherche sur l'insécurité alimentaire - Retour sur la conférence PROOF

   
La première conférence de PROOF, qui avait pour thème: Faire progresser la recherche sur l'insécurité alimentaire, a réuni à Toronto environ 200 chercheurs et défenseurs venant du Canada et de l’étranger, les 17 et 18 novembre 2016, pour discuter de l’un des problèmes de premier rang auquel doit faire face le Canada : le nombre croissant de gens qui ont de la difficulté à se nourrir. Ces quatre millions de Canadiens aux prises avec l’insécurité alimentaire ont servi de catalyseur à une collaboration accrue entre les universitaires et les organisations communautaires pour trouver collectivement des solutions politiques.

                

Ces deux journées ont donné lieu à des exposés et des débats sur de nombreux points, ainsi que des solutions à l’insécurité alimentaire ancrées dans les communautés. Le revenu minimum garanti a été l’un des principaux sujets de discussion. Ce revenu minimum (aussi appelé revenu annuel garanti) aurait pour fonction de déterminer un revenu plancher en dessous duquel aucun Canadien ne puisse tomber. Il a été proposé par d’éminents économistes, politiciens et des activistes sociaux pendant des décennies et mis à l'essai dans cinq régions d’Amérique du Nord, notamment au Manitoba, prochainement en Ontario, mais aussi probablement au Québec. Ainsi, tout Canadien dont le revenu serait inférieur à un certain niveau recevrait un complément de revenu par le biais du système fiscal. Une façon de s’assurer qu’aucun Canadien n’ait encore à vivre avec le montant insuffisant de l’aide sociale ou de bas salaires venant d’emplois précaires.
 

Nous savons déjà que le revenu minimum de base est une solution efficace à l’insécurité alimentaire, car une variante est offerte aux aînés Canadiens (par le biais du Programme de la sécurité de la vieillesse et par le Supplément de revenu garanti pour les aînés à faible revenu). La recherche montre qu’une fois que les Canadiens atteignent 65 ans, le taux d’insécurité alimentaire chute de 50 p. cent. Selon les chercheurs en insécurité alimentaire, offrir un revenu minimum à tous les Canadiens réduirait considérablement le taux d’insécurité alimentaire, notamment dans les catégories les plus touchées. Le Réseau pour une alimentation durable (RAD) invite depuis longtemps le gouvernement fédéral à lancer une étude de faisabilité pour la réalisation du revenu minimum garanti afin de s’assurer que l’ensemble des Canadiens puissent avoir accès à une alimentation suffisante, sûre, saine et culturellement appropriée..

La question des initiatives communautaires en matière d’alimentation a aussi été au cœur des discussions en mettant en lumière les programmes d’alimentation scolaire et les initiatives relatives à la sécurité alimentaire dans le Nord du Canada. Aux États-Unis, l’absence d’aide suffisante au revenu a conduit à une dépendance aux programmes gouvernementaux tels que le SNAP (bons alimentaires), le WIC (programme de supplément nutritionnel pour les femmes, les nourrissons et les enfants) et les programmes d’alimentation scolaire. Certains chercheurs américains ont mis en relief l’importance de ces programmes qui aident les personnes vivant dans l’insécurité alimentaire.

 
L’insuffisance de revenu est clairement le facteur principal, sans être le seul, qui détermine l’insécurité alimentaire. Beaucoup ont l’impression qu’une aide au revenu suffisante (au niveau ou au-dessus du seuil de faible revenu fixé par Statistique Canada) est la meilleure manière de faire face à ce problème si elle est soutenue par les autres avantages des programmes communautaires, tels que l’amélioration de la santé et de l’inclusion.
 
Les solutions axées sur la communauté offrent des atouts supplémentaires pour encourager l’activisme communautaire et promouvoir une meilleure politique. La sociologue et auteure Janet Poppendieck a ainsi déclaré, « Dans cette prolifération de l’aide alimentaire d’urgence aux États-Unis, les répercussions en aval ont été très significatives, parce que tous ces comptoirs  alimentaires fondés par des religieuses, des pasteurs Afro-américains et des évangélistes latinos ont renforcé la mobilisation contre la faim sur le terrain. Ces acteurs  de la lutte contre la faim apportent une forme de crédibilité quand ils parlent à une commission du gouverneur ou un comité sénatorial, ce que les universitaires et les politiques n’ont pas. Ce travail est fait par des acteurs de première ligne et ils en arrivent graduellement à la conclusion que les programmes d’assistance fédérale sont essentiels à leur travail. »
 
 
Les chercheurs et groupes communautaires collaborent de manière croissante pour identifier les solutions les plus efficaces et endiguer l’augmentation de l’insécurité alimentaire au Canada. Le RAD espère d’autant plus pouvoir jouer un rôle central de rassemblement dans ce dialogue, que la sécurité alimentaire a été définie comme l’un des piliers de la future politique alimentaire du Canada. Dans cette perspective notre directrice générale Diana Bronson a fait une présentation sur la façon dont les universitaires et les organisations communautaires peuvent améliorer leur collaboration. Pour ce faire, elle s’est inspirée de la longue  expérience de travail du RAD avec les chercheurs, et la collaboration de longue date avec l’équipe de PROOF.

Le gouvernement libéral a déclaré qu’il s’engage à baser sa politique sur des faits tangibles. Cela doit résonner comme un appel pour les activistes et les chercheurs afin qu’ils présentent conjointement un dossier solide de soutien aux Canadiens qui souffrent d'insécurité alimentaire. Nous devons travailler ensemble pour éradiquer la faim en faisant la promotion des solutions les plus efficaces et alimenter la Stratégie de réduction de la pauvreté et la Politique alimentaire pancanadienne que le gouvernement élabore en ce moment.