Une politique alimentaire pour faire face à la hausse des prix au Canada

La chute du dollar canadien, passé sous la barre des 70 cents US, provoque de sérieuses répercussions sur le pouvoir d’achat des Canadiens. La situation est particulièrement préoccupante lorsque l’on sait que près de 81% des fruits et légumes consommés au Canada sont issus de l’importation et que le taux d’inflation alimentaire atteint aujourd’hui 4,1%. Une situation sans équivalent parmi les pays industrialisés.

Objectif faim zéro au Canada

La hausse des prix pèse dans les paniers d’achat de tous les Canadiens, mais ce sont les plus vulnérables qui en payent le prix fort. Le Réseau pour une alimentation durable affirme qu’il est inconcevable dans un pays aussi développé que des personnes puissent souffrir d’insecurité alimentaire. 

Selon le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, ratifié par le Canada, tous les Canadiens ont le droit à l’alimentation. Toutefois, 4 millions de Canadiens, incluant 1,15 million d’enfants, font face à l’insécurité alimentaire.

La directrice générale du Réseau pour une alimentation durable, Diana Bronson, souligne dans la presse que, face à la flambée des prix des denrées alimentaires, ce sont particulièrement les classes moyennes et inférieures qui sont touchées, dont plusieurs « ne peuvent trouver un emploi qui les rémunère assez pour être en mesure d’offrir à leur ménage une saine alimentation. Ce sont des étudiants. Ce sont des personnes âgées. Ce sont des gens de la classe ouvrière. Ce sont des immigrants. »

Les premières nations et minorités visibles sont affectées dans des proportions intolérables. Dans le nord du Canada, les communautés autochtones vivent une crise sur le plan de leur sécurité alimentaire comportant de lourdes conséquences sur la santé et le bien-être de leurs membres.

On ne saurait parler d’insécurité alimentaire sans pointer du doigt la pauvreté. Pour éliminer les difficultés à se nourrir convenablement, il faut s’attaquer à la pauvreté avec une forte volonté politique. 

68% des ménages qui disposent d’aide sociale sont en situation d’insécurité alimentaire. Par ailleurs, la majorité des ménages en situation d’insécurité alimentaire (61,1%) s’avèrent être des travailleurs qui disposent d’un salaire.

Dans le cadre de la campagne électorale Je mange donc je vote, le Réseau pour une alimentation durable, en partenariat avec Community Food Centres Canada, a recommandé que le Gouvernement du Canada entreprenne une étude de faisabilité sur la mise en oeuvre d’un revenu minimum garanti, afin de s’assurer que l’ensemble des Canadiens puissent avoir accès à une alimentation suffisante, sûre, saine et culturellement appropriée. Une telle mesure permettrait de s’assurer que tous les Canadiens puissent se procurer les aliments dont ils ont besoin en fixant un revenu minimum garanti en dessous duquel personne ne puisse tomber.

Le prix de l’alimentation saine grimpe avec le huard

Parmi les aliments qui voient leurs prix monter en flèche, les fruits et légumes sont particulièrement affectés. Or, ce sont les aliments dont nous avons le plus besoin pour lutter contre certains problèmes de santé tels que l’obésité et l’hypertension dont souffrent un trop grand nombre de Canadiens.

Six adultes sur dix et plus d’un enfant sur trois sont victimes de surpoids ou d’obésité au Canada, et ce, en large partie à cause d’un régime alimentaire malsain. De saines habitudes alimentaires doivent servir de remède pour combattre l’hypertension, le diabète, l’obésité, l’excès de cholestérol, les cancers et toutes autres complications de santé liées à une alimentation non-appropriée.

Le Canada se trouve dans cette situation paradoxale où les fruits et légumes, qui sont supposés être des produits de première nécessité abordables et accessibles au plus grand nombre, sont en fait dispendieux, alors que l’alimentation issue de la restauration rapide telle que frites et hamburgers sont quant à eux bon marché.

Par conséquent, si nous ne faisons rien, servir davantage d’aliments malsains dans l’assiette des Canadiens nous conduira à davantage de dépenses publiques dans le secteur de la santé. Au-delà des implications désastreuses en matière de santé publique, l’impact se fera également sentir sur les finances publiques.

Une politique alimentaire comme bouclier face à l’insécurité alimentaire

Pour rendre possible l’accès à une alimentation saine, abordable et durable pour tous les Canadiens, le gouvernement fédéral va devoir développer une politique alimentaire cohérente.

L'élection du nouveau gouvernement fédéral a ouvert de nouvelles perspectives en matière de politique alimentaire. Le Premier ministre, Justin Trudeau a chargé Lawrence MacAulay, Ministre de l'Agriculture et de l’Agroalimentaire d’ : « élaborer une politique alimentaire qui fait la promotion d’un mode de vie sain et de la salubrité des aliments en mettant sur la table des familles du pays un plus grand nombre d’aliments sains de grande qualité produits par les agriculteurs et les éleveurs canadiens ».

« Ce n’est pas quelque chose que le ministère de l’agriculture va pouvoir régler à lui seul », explique Diana Bronson. Nous avons besoin d’impliquer de manière transversale « les différents départements ministériels et toutes les parties prenantes : industrie agro-alimentaire et organisations non-gouvernementales, mais les personnes souffrant d’insécurité alimentaire doivent aussi être conviées à la table des discussions », ajoute-t-elle.

Le nouveau gouvernement se doit de reconnaître la politique alimentaire comme étroitement liée à la bataille contre les changements climatiques, à une meilleure santé, à des pêcheries plus durables, à des échanges équitables, à des droits pour les peuples nordiques et autochtones, à l'élimination de la pauvreté (pour en nommer que quelques-uns).

Le Réseau pour une alimentation durable travaille sur cette question depuis la publication de Du pain sur la planche en 2011. Aujourd’hui, il y a de bonnes raisons d'être optimiste quant au futur de notre système alimentaire et d'une politique alimentaire pancanadienne. Cependant, il reste encore beaucoup à faire pour s'assurer que cette nouvelle politique alimentaire nous dirige vers la souveraineté alimentaire, des objectifs d'une faim zéro et d'une alimentation saine, sécuritaire et durable.

Impliquez-vous à nos côtés pour un système alimentaire plus sain, juste et durable: