Tirer le meilleur parti de la nouvelle stratégie de saine alimentation
Lors du Congrès canadien sur la santé cardiovasculaire qui s’est tenu à Montréal le 24 octobre dernier, la ministre de la Santé, Jane Philpott, a dévoilé la vision du gouvernement fédéral pour un Canada en santé. Prévoyant diverses mesures favorisant une vie saine et l’amélioration de la santé mentale, sa principale composante consiste en une stratégie pour une saine alimentation afin de guider les Canadiens dans l’élaboration de régimes sains.
L’allocution qu’a donnée la ministre Philpott est encourageante et propose la mise en place d’une approche conjointe. Elle a proposé d’agir sur les déterminants de la santé, affirmant que « la voie vers un environnement alimentaire sain au Canada exige l’intervention de toute la société. Il faut y intégrer l’agriculture durable, la sécurité alimentaire, le coût de la nourriture, la façon dont elle est distribuée, les lieux où elle est vendue, la manière dont elle est préparée, et bien plus encore ».
La version actuelle de la Stratégie pour une saine alimentation s’articule autour de six mesures, dont cinq apparaissent dans la lettre de mandat que lui a remise le premier ministre. Plusieurs de ces mesures ont également été suggérées dans une fiche d’information sur l’alimentation qui a été publiée par le Réseau pour une alimentation durable et le Dr Norman Campbell, alors titulaire de la Chaire FMCC/IRSC en prévention et contrôle de l’hypertension.
Le Guide alimentaire canadien
La première mesure prévue consiste à réviser le Guide alimentaire canadien, dont la dernière mise à jour remonte à 2007. Cette mesure, qui a suscité de vifs débats, n’apparaît pas dans la lettre de mandat de la ministre Philpott, mais fait plutôt l’objet d’une recommandation émanant du rapport du comité sénatorial sur l’obésité. Un processus de consultation a été lancé, offrant ainsi une belle occasion au mouvement alimentaire de former une coalition et de plaider pour que la portée des recommandations alimentaires soit élargie de manière à ce qu’elles prennent en considération un ingrédient jusqu’à présent négligé : la durabilité. Puisque notre santé est intimement liée à celle de notre environnement, il est impératif de renforcer la durabilité des systèmes alimentaires et de redéfinir la notion d’aliments sains afin qu’elle ne tienne pas uniquement compte de leur valeur nutritive. Les régimes sains ne sont pas seulement l’affaire de choix alimentaires individuels; ils doivent reposer sur des systèmes alimentaires socialement et environnementalement durables.
Les efforts déployés pour promouvoir les régimes durables gagnent actuellement une ampleur mondiale alors que la Suède, le Brésil, le Qatar et l’Allemagne ont intégré des critères de durabilité au sein de leurs lignes directrices nationales en matière d’alimentation. Nous prévoyons adapter le contenu d’un atelier (Régimes durables et Guide alimentaire canadien) qui s’est déroulé dans le cadre de la récente assemblée du RAD, la Tablée des idées, pour en faire un webinaire. D’autres détails suivront.
Meilleur étiquetage
La deuxième mesure prévue consiste à améliorer l’étiquetage des aliments, notamment en affichant les informations nutritionnelles sur le devant de leur emballage, ce qui permettra aux consommateurs de rapidement connaître leur teneur en sucre, en sel et en gras saturés. Santé Canada étudiera deux grandes approches : l’utilisation de symboles de nutriments spécifiques (comme le système inspiré des feux de circulation employé au Royaume-Uni) ou encore d’un système de pointage des aliments (comme le système Guide-étoiles utilisé par certaines entreprises au Canada). Cette nouvelle mesure en matière d’étiquetage des aliments ne viserait pas à remplacer l’habituel tableau de valeurs nutritives, mais plutôt à rendre ces informations plus visibles.
Réduire la quantité de sodium
En 2012, Santé Canada a émis des objectifs volontaires de réduction du sodium à l’attention de l’industrie, laissant à cette dernière jusqu’à la fin de cette année pour les atteindre. Dans un document qui sera publié en 2017, Santé Canada évaluera le taux de réussite de cette mesure; entre-temps, ce ministère travaille à la préparation d’un rapport. Au cours des prochains mois, Santé Canada établira en outre de nouvelles cibles de réduction du sodium « pour les aliments transformés et les aliments consommés au restaurant ».
Éliminer les gras trans produits industriellement
Bien que les quantités de gras trans retrouvées dans les aliments aient été réduites de manière importante, certains Canadiens en consomment encore des quantités qui excèdent les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé. En 2016, Santé Canada a demandé à l’industrie de lui fournir de l’information sur l’utilisation qu’elle fait des gras trans, et entamera un processus de consultation au cours des prochaines semaines.
Restreindre la publicité qui s’adresse aux enfants
Santé Canada imposera également des restrictions à la publicité faisant la promotion d’aliments et de boissons qui sont néfastes à la santé des enfants, semblables à celles mises en place au Québec. La ministre Philpott procède actuellement à l’étude du projet de loi d’intérêt privé S-228 proposé par la sénatrice Nancy Greene Raine. Le leader à la Chambre du NPD, Peter Julian, a de son côté proposé le projet de loi C-313 qui vise la mise en place d’une stratégie nationale régissant la publicité qui s’adresse aux enfants. La coalition Arrêtons la pub destinée aux enfants, dont le Réseau pour une alimentation durable est membre, est active dans ce dossier et a rencontré des représentants de Santé Canada pour s’assurer que ces restrictions soient aussi efficaces que possible.
Le Réseau pour une alimentation durable et la Coalition pour une saine alimentation scolaire ont souligné l’importance de mettre l’accent sur une alimentation plus saine pour les enfants. La Coalition pour une saine alimentation scolaire a en outre demandé au gouvernement fédéral d’investir dans un programme national de saine alimentation en milieu scolaire de portée universelle qui permettrait à tous les enfants canadiens d’accéder à des aliments sains à l’école.
Programme Nutrition Nord Canada
Nutrition Nord Canada (NNC), le programme de subventions censé aider les personnes qui vivent dans le Nord à se procurer des aliments sains, sera lui aussi modifié par la Stratégie pour une saine alimentation, bien que peu de détails aient été fournis jusqu’à maintenant. Pour prendre connaissance des suggestions du Réseau pour une alimentation durable permettant d’améliorer NNC, veuillez consulter la feuille d’information sur notre campagne Je mange donc je vote, de même que le rapport intitulé Débourser pour se nourrir, qui porte sur le coût des aliments dans le Nord.
Comment pouvez-vous vous impliquer?
Au cours des prochaines semaines, Santé Canada consultera les Canadiens au sujet de l’étiquetage des aliments, de la réduction de la quantité de sodium et de l’élimination des gras trans dans les aliments, de même que des restrictions en matière de publicité ciblant les enfants. Le Réseau pour une alimentation durable signalera à ses membres les différentes occasions de prendre part à ce processus. Les fruits de ces délibérations doivent impérativement alimenter le processus d’élaboration de la nouvelle politique alimentaire nationale du Canada, qui a d’ailleurs constitué le thème central de nombreuses séances lors de notre 9e assemblée.
Plusieurs consultations portant sur diverses questions alimentaires ont actuellement cours. Consultez ce site web afin d’obtenir plus de détails sur le déroulement du processus visant la modification du Guide alimentaire canadien, et soumettez vos commentaires dans le cadre de la première phase- la consultation publique (du 24 octobre au 8 décembre 2016).
En mai 2016, le ministère des Affaires autochtones et du Nord du Canada a lancé un processus de mobilisation portant sur le programme Nutrition Nord Canada. Pour plus de détails, veuillez consulter ce site web.
Agriculture et Agroalimentaire Canada mène également une consultation portant sur le prochain cadre politique en agriculture. Vous trouverez plus de détails sur ce site web. Nous nous attendons à ce que les consultations formelles sur la nouvelle politique alimentaire nationale commencent l’année prochaine.
Considérant les nombreuses consultations en cours, les organisations de la société civile doivent bien s’organiser à partir des informations que nous avons préparées à leur attention et, dans la mesure du possible, se coordonner entre elles afin de soutenir nos différentes recommandations. Le Réseau pour une alimentation durable continuera de soutenir ce processus, contribuant ainsi à assurer que les points de vue de nos membres soient effectivement entendus. .
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